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Les Années 17-18

 

 

 


 

 

 

 

 

  

Il est à noter que l'armée anglaise est également bien présente à Guînes durant toute cette période. Toutefois, il ne s'agit que du passage de matériels militaires ; les cantonnements des militaires britanniques ne durent qu'une nuit ou deux. Les Anglais vont eux aussi occuper la ville de Calais, ils ont eux aussi besoin d'une base de ravitaillement. Belges et Anglais vont se partager le port de Calais et pour notre proche région les cantonnements anglais se feront davantage sur Hardinghen, Bouquehault, Hermelinghen.

Signalons également qu'avec les colonies débarquent dans la région des fidjiens, des arabes, des chinois, des africains. Petite anecdote concernant les Chinois : Ceux-ci aimaient particulièrement les chapeaux et les vêtements européens. Ils les enfilaient les uns sur les autres et en plein été au plus fort de la chaleur on pouvait croiser les Chinois avec 3 ou 4 couches de vêtements et même 2 ou 3 chapeaux superposés.

    Signalons également que l'arrivée massive des Anglais à Calais va servir à la propagande allemande qui affirme alors que Calais va rester anglais après la guerre. Il est vrai que c'est une vieille habitude. Avec les bombardements qui se répètent régulièrement sur Calais, Guînes voit maintenant arriver bon nombre d'habitants de cette ville voisine qui viennent trouver refuge à la campagne.

    Le printemps 1915 coïncide avec l'installation de l'école de cavalerie belge installée à Campagne-les-Guînes. Si l'école de cavalerie belge est installée à Campagne les Guînes, (son responsable est le major HAEGEMAN) , une école d'artillerie belge est installée quant à elle à Audresselles, avec un camp d'instruction à Calais ; les mortiers et la TSF sont également à Calais et un camp d'instruction du Génie est à Ardres.

Les militaires sont amenés à remplacer les services assurés habituellement par les Guînois. C'est ainsi qu'un détachement de quinze hommes du 7e Territorial va installer un poste d'incendie dans la rue du Bassin, sur l'emplacement de l'écurie LANGLET, puisque les pompiers locaux sont partis à la guerre. Le poste d'incendie est équipée de fusils et de mitrailleuses pour tirer sur les TAUBE si l'occasion s'en présente.

    Le 10 mai 1915, on enterre en grande pompe le commandant belge VON DER BRANDEN, décédé à l'hôpital de Calais des suites du cancer du fumeur. La musique des Guides a participé à la cérémonie ainsi que l'ensemble des soldats belges présents à Guînes. Le cercueil fut porté à bras du Batelage à l'église.

    Des Guînois ont aperçu un Zeppelin passant au-dessus de la ville pour se diriger vers Calais où les bombardements redoublent de violence.

    Au chapitre des faits divers, un soldat belge logé à Bouquehault et soupçonné de vol d'argent, a été pris en flagrant délit par le propriétaire des lieux. Dans la bagarre qui s'en est suivie, le militaire a été assommé. Peu de temps après, il mourra des suites de ses blessures.

    Les incidents avec les soldats belges sont plus ou moins tragiques mais, par opposition, il faut également saluer les rencontres de football entre militaires belges et anglais et les nombreux concerts de la Musique des Guides.

A la mi-juin 1915, il faut signaler un départ important de soldats belges parmi lesquels un noir congolais prénommé SIMBA qui durant sa présence à Guînes a bien sûr suscité beaucoup d'intérêt. Les troupes ont défilé sur l'avenue Auguste-Boulanger devant le major MICHAUX, lequel a prononcé quelques mots avant que la troupe ne se dirige vers Andres. C'était le Prince de Croy qui les commandait.

Le 6 juillet 1915, le commandant JOFFRE, commandant en chef des armées alliées, vient à Calais pour s'entretenir avec différents partenaires anglais, français et belges. Il a visité les travaux et fortifications militaires exécutés sur la Côte et après avoir inspecté les installations du Mont de Fiennes, il passe par Guînes pour retourner sur Calais. Il est 6 h lorsque sa voiture passe à hauteur du poste installé à la Forge REGNIER, en face du café BELLEVUE. Les hommes de faction lui ont présenté les armes mais la voiture du général Joffre ne s'est pas arrêtée.

Ce passage a toutefois été une source d'animation pour notre petite bourgade où l'un des événements notables de cette visite fut la remise d'un bouquet de fleurs au Général par la fille de Henri HAMY, agriculteur à la Ferme du Mont de Fiennes.

Pendant ce temps, on annonce la mort du Sergent LAMARRE aux Dardanelles ; du Soldat FERAMUS dans un hôpital de Lyon où il a été échangé comme grand blessé, tandis que le soldat CACHE est revenu à Guînes avec une jambe en moins.

Pendant la période estivale, si la Fête nationale et la Ducasse passent inaperçues, la Fête nationale belge, elle, est commémorée comme il se doit à la date du 21 juillet.

Septembre et octobre 1915 voient la ville de Guînes se vider peu à peu de ses régiments belges. Ils sont remplacés, à partir du 1er novembre, par un détachement de 700 hommes du Génie venant de Furnes pour l'exploitation de la forêt. C'est à cette période qu'un violent incendie détruit une grande partie de la Malterie BILLET située près du Pont d'Avignon, au Batelage. Le feu a été combattu par les pompiers militaires français aidés des soldats belges et avec le renfort d'une motopompe anglaise.

L'année 1916 débute par un incident qui va opposer à l'Hôtel de Calais le MAJOR MICHAUX et le dénommé FLAMENT, marchand de volailles à Guînes. Ce monsieur Flament refuse en effet de laisser occuper ses bâtiments professionnels par les chevaux belges et ce, malgré une réquisition officielle. C'est incident se déroule dans un établissement public de la ville et lorsque le Major Michaux demande au sieur Flament comment il aurait fait s'il avait dû supporter les « boches » dans ses bâtiments, le Guînois répond : « J'aurais fait comme vous, je me s'rais sauvé».

A ce moment-là, le commandant belge, dont il faut rappeler la forte stature, a bondi sur le dénommé Flament pour lui asséner sur la tête un bon coup de poing ; ce à quoi le sieur Flament n'a point pu riposter. Plus tard, NARCISSE BOULANGER fera des excuses aux officiers de l'armée belge à la suite des écarts de langage dont s'est rendu coupable M. Flament. Une lettre a été affichée dans le bureau militaire.

Nous sommes alors en plein cœur de l'hiver 1916, un hiver rigoureux. En cette période difficile, le prix des denrées de première nécessité a augmenté de façon importante et les décès se comptent par dizaines chaque semaine. Les enfants sont particulièrement touchés.

Les Guînois font connaissance avec le pain bis, un peu plus dur que le pain blanc, mais ils se consolent en se disant qu'il est beaucoup plus nourrissant. Avec le retour des beaux jours, EUGENE BROUTTIER note les sorties journalières de la Comtesse D'OUTREMONT, arrivée depuis peu à Guînes. Madame la Comtesse monte à cheval en compagnie de son mari, lieutenant de l'Armée Belge. A ce propos, signalons que bon nombre d'officiers sont en poste à Guînes avec femmes et enfants.

On a installé dans la forêt une scie mécanique pour l'exploitation nécessaire du bois aux armées.

    

Pour la population, les Conseils de révision se suivent avec une cadence soutenue. Les jeunes de 18 ans sont déclarés « bons pour le service » et beaucoup d'ajournés et d'exemptés sont revus pour être finalement enrôlés. Quant à la vie locale, elle n'est marquée que par les fêtes et événements religieux : communions, processions, etc..

 

En septembre 1916, le tempérament bouillant du Major MICHAUX est de nouveau mis en exergue. Le Préfet ayant pris un arrêté qui oblige les Belges à payer l'octroi sur les produits qu'ils amènent en France, le Commandant de l'armée belge à Guînes retirera les militaires mis à la disposition des agriculteurs pour la moisson.

Le Major Michaux fera machine arrière après la plainte déposée par les cultivateurs auprès du préfet.

Le directeur de la Banque de France vient régulièrement à Guînes, dans le Grand Salon de l'hôtel de ville, tantôt pour échanger l'or contre argent papier, tantôt pour présider à la constitution d'un comité de notables qui va se charger de percevoir les fonds des emprunts nationaux. Finalement, ces emprunts marchent plutôt bien puisque banquiers et notaires se démènent pour décrocher les souscriptions (contre une commission évidemment.

Autre sujet de dissension entre l'autorité militaire belge et les autorités locales : l'hospice de Guînes. En effet, une ambulance belge est établie dans les locaux de l'hospice mais, à chaque hospitalisation, la direction de l'hospice a décidé de passer le tarif journalier à 2 francs au lieu de 1 franc 50 précédemment. Le drapeau de la Croix Rouge qui flottait à la porte de l'hospice a été retiré et les ambulanciers belges se sont retirés dans une ancienne brasserie.

Ouvrons un nouveau chapitre des faits divers avec un attentat concernant la commune de FIENNES et plus précisément le hameau de BOEUCRES où un couple de rentiers a été attaqué par deux soldats belges. L'épouse a été violentée et un vol de 400 francs a été constaté. Les deux auteurs de l'attentat seront condamnés par le Conseil de guerre à 20 et 25 ans de bagne.

J'en reviens dans le même chapitre des faits divers au Major Michaux et à sa façon particulière de sermonner les fauteurs de troubles. C'est ainsi qu'en représailles des actes de vandalisme de ses soldats et en pleine cérémonie de revue de troupes sur la Grand'Place, il sermonne deux soldats qui avaient commis quelques excès dans les cafés la veille au soir et leur assène quelques coups de poing.

L'hiver 1916/1917 est également très rigoureux avec son nouveau cortège de privations.

Peu d'événements à signaler jusqu'au 20 juin 1917, où de nouveaux soldats belges revenant du front vont venir cantonner à Guînes et dans les environs. Il est question de 700 chevaux, 180 officiers et environ 6000 hommes. Trois généraux trouvent à se loger chez Mlle DE GUIZELIN et un autre au Château MABILLE, au Batelage.

    

Soldats Belges logés chez l'habitant (Arnold d'Sjoën - Sylvain Kancken)

Cette arrivée massive de troupes créée une grande effervescence dans la ville. Cette nouvelle invasion, toute pacifique qu'elle soit, n'a plus désormais le même attrait enthousiaste. En effet, elle coïncide avec une nouvelle flambée des prix des victuailles. '

Durant l'été 1917, des TAUBE et Zeppelins passent au-dessus de Guînes et quelques obus sont même lancés. Des éclats sont retrouvés ici et là et un obus non éclaté est récupéré près de la ferme Michaux. Ces événements coïncident avec les bombardements sur Calais qui ont amené l'installation de 40 mitrailleuses dans la plaine d'ANDRES. Le soir, les Guînois peuvent apercevoir la lueur des projecteurs sur Calais et l'éclatement des Schrapnels. Le 1er octobre 1917, des TAUBE lancent des bombes sur Guînes. La ferme des Remparts est visée mais il n'y a pas de dégâts.

Durant cette période où les Belges ont été présents à Guînes, un directeur d'école publique, M.Théry, a également laissé quelques notes intéressantes.

Il faut d'abord relever dans les notes de cet instituteur, son effarement, voire son inquiétude à l'égard des troupes coloniales. Théry parle des rites indigènes, de cris sauvages poussés à l'occasion d'un enterrement, (il a vu notamment des troupes sénégalaises et hindoues), et il fait part de son grand étonnement face à leur façon de vivre et à leurs coutumes. Ce discours est fort étonnant de la part d'un instituteur mais il montre le grand décalage qui existe à cette époque entre un monde où l'Occident veut imposer sa loi et la réalité de ces pays d'Outre-Mer qui n'avaient rien demandé à personne.

J'ai été choqué par le discours de ce directeur d'école qui dans son récit, traite de sauvages les soldats des troupes coloniales et dans un autre chapitre, se félicite d'avoir pu prendre le thé et de discuter avec les soldats britanniques du camp d'aviation de la route de Caffîers.

En tout cas, ce monsieur nous apprend à propos des troupes belges que 8 jeunes ressortissants ont obtenu leur certificat d'études et que deux autres jeunes étudiants belges ont été admis au brevet élémentaire.

Ceci s'ajoute au fait que les troupes belges ont parfois logé sur place avec femmes et enfants et qu'il s'agissait assurément de familles aisées.